Chapitre 1 : Alex
Moi, Angela, quatorze ans. J’observe mon éternel reflet par la fenêtre transparente de ma chambre. (Pas de chance, la construction de la maison d’en face est terminée ; de nouveaux voisins en perspective !) J’aurais pu être jolie. Visage fin, Longs cheveux bruns, des yeux vert bouteille en amande, bronzée, avec un sourire éclatant révélant de magnifiques dents blanches...Pas mal ! Mais je suis grosse. ENOOORME !!! A quinze ans, je pèse quasi cent kilos. Je suis obèse. Je ne peux pas vous dire le nombre de larmes que j’ai versé. Le nombre de fois où je me suis fait vomir, sans résultats. Alors je suis devenue dépressive...Je suis restée enfermée dans ma chambre, sans en sortir pendant les cinq premiers mois de l’année. Je devenais encore plus dépressive quand j’entendais ma mère, dans sa chambre, juste au dessus de la mienne, pleurer sans arrêt sur mon sort. Mais elle ne savait pas ce que j’endurais. Personne ne pouvait comprendre et surtout pas elle. Elle était mince, 58 kilos, grande, 1,75M, blonde, des yeux bleus, un sourire mystérieux : le genre de femme que tous les hommes s’arrache. Si papa était encore là, il aurait pu me comprendre, il m’aurait soutenu jusqu'à la fin. Je crois que c’est quand il est parti que je me suis noyée dans la nourriture...pour...oublier. Mais ça n’a servi à rien du tout parce que je n’ai rien oublié et je suis aussi grosse qu’un hippopotame. Mais ça va changer ! Je l’ai rencontré. Qui ? Celui qui pourra m’aider. Alex. Alex. Alex. Alex. Je ne cesse de me répéter son prénom. Il pourra être un super ami. Le seul ami que j’ai d’ailleurs. Je vais vous raconter. C’était le 13 Juin, hier. J’étais seule à la maison, ma mère était au travail. Elle travaille dans une agence de voyage. Et ma petite sœur, Audrey, était à l’école ; elle est au CE2. Maman avait oublié de prendre le courrier. Et j’attendais les devoirs que devait m’envoyer mon école. Je prenais des cours par correspondance parce que je ne voulais plus sortir de chez moi. J’avais décidé de faire quelque chose d’insensé mais vous savez c’est sensé d’être insensé ! Bref, j’ai enfilé un jean et un T-shirt taille XXL, j’ai pris mon courage à deux mains et je suis sortie. J’ai filé jusqu'à la boite aux lettres. J’ai inséré la clé dans la serrure et...le facteur n’était pas encore passé ! J’étais sortie pour rien... quand une voix m’interpella :
_ Désolé, je suis en stage et je ne suis pas encore habitué à passer à l’heure, voilà votre courrier.
Je me retournai en baissant la tête.
_ Merci, Au revoir.
_ Waouh t’es très directe ! Tu as quel âge ? Tu vas au collège ?
_Dans l’ordre : quatorze ans, je ne vais pas au collège.
_ Moi Oui ! Je suis nouveau. Je ne connais pas beaucoup de monde mais j’essaye de m’habituer.
_Tu n’as pas d’autres courriers à livrer ???
_Oh...Ma présence ne semble pas t’enchanter. Ta maison est la dernière du quartier donc je n’ai plus de courrier à livrer. Je suis désolé mais quand je t’ai vu...tes yeux ont une de ses lueurs...j’ai cru qu’on pourrait être amis. Au collège, je ne me sens pas dans mon élément. Dans cet océan de snobs, de voyous, d’intellos ou alors de sportifs déchaînés je ne trouve pas ma place...Et puisqu’on est désormais voisins, j’ai cru que...
_ Ah ! C’est toi qui habite la maison d’en face ?
_ Oui. Excuse-moi de t’avoir dérangée.
_ Non, excuse moi de t’avoir parler sur ce ton. Je suis un peu à cran ces temps-ci...Tu veux entrer boire quelque chose ?
Je n’arrive pas à croire que j’avais proposé à un garçon que je ne connaissais à peine de rentrer dans ma maison...et en plus de boire quelque chose alors que je ne voulais même pas que la seule fille qui était une bonne copine pour moi me voit dans cet état ! Oh oui. J’ai oublié de vous parler d’elle. Yumi Ishiama. C’est la fille la plus généreuse, la plus belle et la plus extraordinaire que je connaisse. Cette jolie japonaise est la seule en qui je pense pouvoir faire confiance. Quand j’étais encore au collège, c’était une très bonne copine. Je ne dirais pas une amie parce qu’elle avait un secret. Je ne sais pas lequel parce qu’elle ne voulait pas me le dire. Si c’était vraiment une amie, elle me l’aurait dévoilé sans états d’âme... Mais c’était quand même une bonne copine qui insistait pour passer à la maison et qui ne supportait pas mes refus incessants. Je ne voulais pas qu’elle ressente de la pitié pour moi c’est tout. Notre amitié ne serait plus pareille quand elle me verra. Je le sens. Mais Alex...Je ne sais pas pourquoi je l’ai invité comme ça sans calculer. Nous voilà alors attablé dans la cuisine autour de verres de soda (light pour moi !) avec des petits glaçons rigolos à nous raconter nos vies. Je ne lui ai rien épargné. Je lui ai tout raconté. Il m’écouta sans m’interrompre et sans l’ombre d’un rire moqueur quand il m’avoua :
« _ Moi aussi j’étais obèse. Et je peux t’avouer que j’étais beaucoup plus gros que toi. Enormissime !!!
_ Toi ??? Obèse ??? Tu te fous de moi ?
_ J’aimerais bien ! Mais je vais t’aider. Dans un mois, tu seras aussi mince qu’un fil de crin.
_ Oh mais tu sais, j’ai déjà tout essayé ! Me faire vomir, ne rien manger...Tout essayé.
_ Sans vouloir te vexer, tu n’as rien essayé là. Fais moi confiance s’il te plaît.
Je ne sais pas pourquoi je n’ai pas hésité à obéir. Quand j’étais avec LUI, je ne savais plus rien.
_ D’accord, lui répondis-je avec mon plus beau et plus sincère sourire.
_ Oh je t’...adore déjà, dit-il en rougissant.
Pendant un moment, j’ai cru qu’il allait dire autre chose. Mais comment je peux être aussi bête ! Tant que je serais aussi grosse, aucun garçon ne s’intéressera à moi.
_Tu sembles perdu dans tes pensées ?, m’interrogea Alex.
_ Excuse moi, lui répondis-je en souriant et rougissant, sortie de ma rêverie.
Soudain une sonnerie nous interrompit. Il sortit un téléphone portable noir et argenté très plat et très joli.
« _Allo ? dit-il en décrochant.
_...
_ Oui j’arrive tout de suite ma puce. »
Oh j’ai eu mal quand il a dit cela, j’ai eu tellement mal. Ainsi il avait une copine. Mais pourquoi ça me dérangeait tant ?